9 juil. 2025

Du journalisme aux flomages, Florence Rémilly a mijoté sa reconversion

Par

Anne Devineaux

Société

5 mins

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Après quatorze années passées dans le journalisme et la communication audiovisuelle, Florence Remilly a choisi de changer radicalement de cap. Elle crée « La cuisine végé de Flo » et devient traiteur spécialisée dans les fromages végétaux. Dans le cadre de la série Les portraits de l’été – La série qui donne envie de bifurquer, elle raconte comment une période de ruptures a ouvert la voie à une reconversion choisie, portée par la passion de la cuisine, la cause animale et l’envie de transmettre autrement.

©Inès Krimi/En un battement d'aile

Vous êtes ancienne journaliste devenue traiteur vegan. Votre entreprise s'appelle La cuisine végé de Flo. Nous sommes chez vous à Pierre-Bénite, au sud de Lyon, là où vous préparez toutes vos recettes, uniquement à base de produits d’origine végétale. Pour commencer, vous nous avez fait goûter vos fameux "flomages". De quoi s'agit-il ?

Les "flomages", ce sont des alternatives végétales au fromage conventionnel. Je les prépare sans aucun ingrédient d'origine animale. J’utilise de la noix de cajou, du tofu, des graines de lupin ou encore de la boisson de soja que je fais cailler, comme on le ferait avec du lait animal. Ensuite, j’ajoute des ferments et j’affine le tout. Le procédé est très proche de la fabrication traditionnelle du fromage.

Avant de revenir à votre activité actuelle, parlons de votre vie d’avant. Vous avez étudié le journalisme, travaillé dans des télévisions locales, puis dans la communication. À quel moment avez-vous décidé de changer de voie ?

J’ai exercé pendant quatorze ans, d’abord en télé locale, puis à mon compte dans la communication audiovisuelle. C’étaient déjà des métiers passion. Et puis à un moment donné, des fois vous traversez des choses dans la vie qui font que vous bifurquez. J'ai traversé une rupture au niveau personnel, puis tous mes contrats professionnels ont été annulés. Et là j’ai eu besoin de redonner du sens à ma vie. Et la cuisine végétale s’est imposée comme une évidence. Je n’avais aucune formation, mais c’était un métier qui m’appelait.

Vous êtes végétarienne depuis l’âge de 14 ans, mais vous adorez manger !

Oui, je suis une vraie épicurienne ! À 14 ans, un jour en rentrant du collège, je suis tombée sur un reportage à la télé sur les conditions d’élevage et d’abattage des animaux. Ça m’a traumatisé. Ce jour-là, j’ai décidé que je ne voulais plus cautionner ça, alors j’ai arrêté la viande.

Un plateau de "flomages" ©En un battement d'aile
Et la cuisine ? Vous y pensiez déjà à l’époque de votre vie précédente ?

Pas du tout ! En 2014, c'est là où toutes les difficultés s’accumulaient. Et j'ai eu l'occasion de faire un stage autour des marionnettes et des images filmées. Tous les midis, j’amenais ma gamelle végétale, préparée maison. Les copains apportaient souvent des plats industriels, et j’ai vu que ça les intéressait beaucoup. Ils me disaient : "wow, qu'est ce que ça a l'air d'être bon ce que tu manges ! » C’est à ce moment-là que je me suis dit : pourquoi ne pas en faire mon métier ? J’aime cuisiner, j’aime manger, et visiblement, ça plaît.

Vous avez créé votre auto-entreprise en 2016, à une époque où l’offre vegan était encore peu développée en France. Qu’est-ce qui a été le plus difficile ?

Le plus dur, ce n’est pas ce qu’on se met comme freins personnels. Moi, je n’en avais pas. C’était clair, je voulais y aller. Le plus difficile, ce sont les freins des autres. Y compris de certaines structures d’accompagnement. On m’a dit : « On ne vit pas de sa passion », ou encore « Il ne faut pas faire un métier passion ». Ça m'attriste mais en même temps ça m'a vraiment encore plus boosté. Moi, j’ai envie de faire un métier qui me plait ! Mais ce genre de discours peut vraiment décourager des personnes plus fragiles. Je trouve ça dommage.

Et votre entourage ? Vous a-t-il soutenue ?

Pas vraiment compris. Mes parents, mes amis ne voyaient pas le lien entre le journalisme et la cuisine. Mais ce n'était pas forcément très important pour moi qu’ils comprennent.

Vous avez eu des doutes, malgré tout ?

Non. Pas du tout. Contrairement à mes proches. Des amis m’ont dit : « Tu n’as pas peur si ça ne marche pas ? » ou « Il faut tout de suite partir sur de la gastronomie ! ». Mais moi, ce que je voulais faire, c’était une cuisine familiale. Je me disais : si ça marche, tant mieux. Si ça ne marche pas, tant pis. Au moins, je n’aurai pas de regrets.

Et ça a marché ?

Oui, assez vite. En cinq ou six mois, j’ai pu me verser un premier salaire. Ce n’est pas rien quand on sait que souvent, il faut plusieurs années pour que les choses se mettent en place. Je suis arrivée avec mes flomages et c'est un produit qui n'existait pas dans la cuisine vegan. Je sais que j'ai été la deuxième au niveau national à faire des fromages végétaux artisanaux. À Lyon, il y a une communauté végane importante, mais quasiment aucune offre artisanale.

Est-ce que votre rapport au travail a changé ?

Je me sens plus en phase. Tous mes métiers ont été des métiers passion, mais celui-ci est aussi un métier de conviction. J’ai envie de montrer qu’on peut se régaler en mangeant végétal, qu’on peut se faire plaisir, réduire la souffrance animale… Et sortir des idées reçues : non, une alimentation végétale, ce n’est pas triste, ce n’est pas carencé, c’est coloré, complet et savoureux.

Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui a envie de changer de métier, mais qui n’ose pas ?

Je lui dirais : vas-y ! Si tu ressens cette envie, écoute-toi. Ce ne sera pas toujours simple, il y aura des freins, surtout de la part des autres. Mais il n’y a rien d’impossible. Moi, je suis passée du journalisme à la cuisine. Par contre, il faut vraiment être dans l’action. Moi, je suis actrice de ma vie et je pense qu’il faut mettre en place des actions pour aller vers l'objectif souhaité.

Et aujourd’hui, vous commencez à transmettre votre savoir ?

Oui, c’était une étape importante pour moi, mettre en place des formations sur la cuisine végétale. J’interviens dans un lycée hôtelier à Vénissieux, et j’ai aussi donné ma première formation à la Chambre des métiers de l’artisanat de Savoie, en mars dernier. Ça s’est super bien passé, j’étais dans mon élément. J’ai vraiment envie de continuer dans cette voie, peut-être de moins produire, et de transmettre davantage.

Découvrez en intégralité "Le portrait de l'été" :

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