18 juin 2025
AlterMonts : cinq ans d’affinage pour la fromagerie bio des Monts du Lyonnais
Par
Inès Krimi
La fromagerie AlterMonts, née en 2020 dans les Monts du Lyonnais, célébrait son cinquième anniversaire le vendredi 13 juin 2025 à Saint-Denis-sur-Coise. Fondée par un collectif de paysans bio, elle défend une agriculture locale, résiliente et accessible. L’occasion d’une fête conviviale, ponctuée de musique, de dégustations… et d’une table ronde, animée par En un battement d’aile, sur la transition écologique à la campagne.
©En un battement d'aile
Sous un beau soleil d’été, le marché paysan bat son plein devant la fromagerie AlterMonts, comme tous les vendredis à Saint-Denis-sur-Coise (Loire). Fruits et légumes, pain, châtaignes ou escargots : les producteurs de la région étaient au rendez-vous pour partager leur savoir-faire bio. Mais ce 13 juin 2025 avait un goût particulier. Pour fêter ses cinq ans, l’équipe avait mis les petits plats dans les grands : gâteau en fromage, ambiance guinguette, concert sur bottes de foin avec le groupe “Les Enfants de Lilith”, ateliers pour les enfants et dégustations pour les plus grands. Une journée festive et militante, à l’image du projet.
AlterMonts : 5 ans d’engagement au service du bio
"Un autre fromage est possible". Le slogan d’AlterMonts résume bien la vision portée par les 4 fermes qui se sont lancées dans l’aventure en 2020. La Ferme Besson, le GAEC de la Brumagne, la Ferme des Deux Hélices et la Ferme du Val Fleury - soit un collectif de 9 paysans - ont fait le pari de recréer une filière locale de transformation du lait bio.
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À l’époque, les fromageries collectives avaient disparu des Monts du Lyonnais, remplacées par des structures industrielles. Le lait des fermes partait loin pour être transformé, vidant de son sens une agriculture pourtant pensée pour être de proximité.
Leur objectif ? Recréer un outil coopératif, à taille humaine, qui redonne du sens à leur métier. « Faire du bon, du juste, du local », résume Gilbert Besson, éleveur à Saint-Galmier. « On voulait redonner du sens à ce que l’on met dans nos assiettes. »
Les agriculteurs soufflent leurs 5 bougies ©En un battement d'aile
Sur la petite scène installée devant la fromagerie, les prises de parole se succèdent. Anne Besson rappelle les chiffres : plus de 600 000 litres de lait collectés et 55 tonnes de fromage produites en 2024. « On résiste à la morosité ambiante, au désintéressement du bio, aux attaques de l’agro-industrie. On est là, et on ne lâche rien. »
Dans la foule, des sourires et de l’émotion. Caroline Gloria (ferme du Val Fleury) s’adresse directement aux consommateurs : « Le plus grand merci, c’est à vous. Vous êtes la preuve vivante qu’un autre modèle est non seulement possible, mais désirable. »
Et Adrien Mazet (ferme du Val Fleury) d’évoquer l’avenir : « On veut continuer à créer du lien avec d’autres groupes de paysans. Que cette fromagerie reste un lieu vivant, un laboratoire social et territorial, un levier de justice alimentaire. »
La campagne aussi fait sa transition
Au-delà de la production de fromages, AlterMonts veut être un espace de rencontre et de réflexion. Pour l’occasion, En un battement d’aile animait ce soir-là une table ronde sur le thème : « Transition écologique : et la campagne dans tout ça ? »
Car si les discours écologistes s’adressent souvent aux villes, les territoires ruraux sont en première ligne : gestion de l’eau, mobilités, économie locale… Mais les obstacles sont nombreux, comme l’a rappelé Caroline Maillet, du Groupement régional alimentaire de proximité (GRAP) : « Quand on dit bio, on pense bobo, on pense riche… C’est difficile de faire changer les mentalités. »
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Elle évoque aussi les freins administratifs rencontrés par certains projets agricoles, comme l’épicerie bio La Carline, installée à Die, dans la Drôme qui avait décidé d’installer une ferme maraîchère pour se fournir en légumes notamment : « Ça a été un vrai parcours du combattant d’arriver à s’installer, au niveau administratif, parce qu’il pouvait y avoir de la frilosité de la part des élus. »
Echange avec le public lors de la table ronde ©En un battement d'aile
Un constat partagé par Thomas Bondoux, habitant engagé, qui a enquêté auprès de seize maires du Pays de l’Arbresle sur la place de l’écologie dans les politiques locales : « Dans les villages, les élus ne sont souvent affiliés à aucun parti. Les élus locaux sur les petits villages vont plutôt travailler sur le vivre-ensemble, le cadre de vie… »
Le président de la communauté de communes des Monts du Lyonnais, Régis Chambe, dénonce à son tour la lourdeur bureaucratique : « Ça nous met en rage. Cette administration tue des projets. » Il souligne cependant que certains élus locaux sont plus proactifs que les instances nationales.
Un lieu ouvert sur son territoire
La table ronde s’est conclue par un échange avec le public, avant que la fête ne reprenne ses droits. Un atelier de fabrication de beurre attire les enfants, pendant que les adultes trinquent autour d’un plateau de fromages.
Matthieu Gloria sur l'atelier dégustation ©En un battement d'aile
Matthieu Gloria, agriculteur au Val Fleury, résume l’ambition du collectif : « On veut que la fromagerie ne soit pas juste une boutique, mais un lieu ouvert, engagé, connecté à son territoire. » Et d’annoncer la suite : « On était 4 fermes au début. En 2025, on collecte sur 8 fermes. À l’horizon 2030, on espère dépasser le million de litres de lait transformés, avec plus d’une dizaine de fermes engagées. »
