1 oct. 2025

« Born in PPM » : quand la photographie raconte le dérèglement climatique

Par

Florence Gault

Culture

6 mins

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PPM. Trois lettres qui traduisent la concentration de CO₂ dans l’atmosphère et témoignent de l’impact de l’activité humaine sur la planète. C’est autour de ce chiffre que Mary-Lou Mauricio a conçu son projet photographique Born in PPM, dans lequel chaque participant·e pose avec le taux de CO₂ de son année de naissance, transformant la science en émotion visuelle. Rencontre.

©Edouard Montfrais-Albertini

Après quinze ans dans l’événementiel de luxe, Mary-Lou Mauricio réoriente en 2020 sa carrière vers l’urgence écologique, utilisant la photographie pour sensibiliser et transmettre l’urgence liée aux émissions de carbone. De passage à Lyon pour un shooting lors des Rencontres Art et engagements de la Compagnie Oxymores, elle revient sur son parcours et son projet.

Comment est née l’idée de cette série Born in PPM ?

Mary-Lou Mauricio :  Ça a été très longtemps dans ma tête. En fait, je découvre la Fresque du Climat en 2020 et c’est une claque. Personne ne m’avait expliqué que le CO₂ est une particule inerte qui reste très longtemps dans l’atmosphère. Quand j’ai compris ça, je me suis dit qu’il fallait absolument que tout le monde comprenne. J’ai cherché comment rendre visible l’invisible. Ce qui n’est pas simple ! J’ai commencé à avoir l’idée d’associer l’année de naissance au taux de CO₂ de cette année-là. Et quand un appel a été lancé pour créer des œuvres artistiques autour de la COP27, en 2022, je me suis lancée et j’ai créé trente portraits dans mon salon avec des personnes de tous âges pour montrer la croissance du CO₂ au cours du siècle et aussi parler de la justice climatique. 

Et cette idée d’injustice, vous avez voulu la montrer comment à travers vos portraits ?

Dès la première série, j'avais fait venir une personne réfugiée et son parrain de l'association Parrain par mille. Je voulais que les gens comprennent qu’on a encore plus de responsabilités. Car aujourd’hui, certains subissent le changement climatique alors qu'ils n'ont pas bénéficié de nos vies carbonées. On leur inflige les conséquences de nos choix, et aussi aux générations à venir. C'est pour ça que j'ai voulu inclure un bébé et des femmes enceintes, pour montrer que c'est quelque chose qu'on lègue à ceux qui ne sont pas encore là. 

Quel message vous avez envie de transmettre avec vos photographies ?

D’abord, les portraits permettent de sensibiliser les participants eux-mêmes. Avant de poser, on leur explique ce que sont les PPM, et on redonne les chiffres importants, comme la limite planétaire de 350 PPM que nous avons dépassée en 1988. On leur demande ensuite ce qu’ils ressentent, ce qu’ils veulent dire. Chacun a un message à transmettre, qu’il soit triste, engagé ou personnel. C’est cette rencontre qui est l’étape numéro un, avant même la photo. Après, je leur envoie la photo pour qu’ils puissent en parler, et c’est ce qui permet à mon projet de devenir viral et collectif. 

Jane Goodall ©Mary-Lou Mauricio/Born in PPM

Déjà plus de 5000 portraits. Des personnalités engagées comme Yann Arthus-Bertrand, Jane Goodall ou le chef Raoni ont croisé votre objectif, mais aussi des anonymes et des jeunes. Quand vous les regardez, qu’est-ce qui vous saute aux yeux ?

L’émotion, surtout. Je me rappelle quasiment toutes les photos. J’ai un attachement aux histoires, aux personnes, à l’endroit où c’était pris. Bien sûr, certaines photos me plaisent plus que d’autres pour des raisons esthétiques ou émotionnelles. Mettre en forme le livre a été très émouvant : il contient toutes les années de naissance, de 1925 à 2025. Quand je l’ai eu entre les mains et que j’ai retracé un siècle de portraits, c’était assez touchant. 

Quelles photos vous ont le plus marqué ?

Le jour où l’on m’a dit que j’allais prendre Jane Goodall en photo, j’étais très impressionnée. C’était drôle, parce que je l’ai fait poser seule et la photo était fermée. Et là, une petite fille, fan de Jane, née à 407  PPM alors que Jane est née à 307 PPM, passe. Et j’ai vu son visage s’illuminer. Et elles ont posées ensemble !

Il y a aussi la photo de Yann Arthus-Bertrand, qui m’a fait un doigt d’honneur ! Je l'avais déjà rencontré, mais là, j’étais jeune photographe, le projet débutait. Et là, il me sort son doigt d’honneur, devant 20 personnes autour de nous, c’était très impressionnant !

Yann Arthus-Bertrand ©Mary-Lou Mauricio/Born in PPM

Certaines rencontres m’ont beaucoup touchée, notamment une jeune scientifique dans une entreprise ultra corporate, qui s’est mise à pleurer en posant, consciente de l’urgence climatique. Je lui ai demandé si elle acceptait de se faire prendre en photo comme ça et elle a dit oui.

Et puis, il y a la fameuse photo des femmes enceintes. C’est la dernière photo du livre  Born in PPM. On leur a dessiné un gros point d’interrogation sur le ventre pour dire : « Qu’est-ce que l’humanité va décider aujourd’hui pour les enfants à venir ? » C’est émouvant, parce qu’il faut du cran pour porter la vie quand ça va pas…

Et vous? À quel taux de PPM êtes-vous né.e ? Découvrez-le sur https://borninppm.com


Découvrez en intégralité notre entretien avec Mary-Lou Mauricio dans le podcast d'En un battement d'aile :

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